La «bosse des maths» est un mythe

L’hypothèse selon laquelle certains cerveaux seraient programmés pour être doués en maths, tandis que d’autres ne le seraient pas, a longtemps été partagée par les élèves, les professeurs et les parents du monde entier. Ce qui a eu pour conséquence de persuader ceux qui avaient des difficultés avec les mathématiques à l’école qu’ils ne pourraient jamais rien faire pour s’améliorer. Cependant, cette croyance est fausse, car être bon en maths ne dépend pas vraiment d’une quelconque prédisposition naturelle (sauf dans le cas de la dyscalculie et des Troubles Spécifiques de l’Apprentissage). Il s’agit simplement d’une question d’éducation et de recevoir l’enseignement des compétences et outils adéquats. Croire en l’existence de la «bosse des maths» n’amène qu’à décourager de nombreuses personnes de s’intéresser aux mathématiques et de choisir une carrière dans le domaine des STEM. Cela peut également augmenter le taux d’«anxiété mathématique» parmi la population.

L’«anxiété mathématique» se définit comme la réponse émotionnelle négative plus ou moins sévère se produisant dans des situations qui impliquent des activités mathématiques et numériques. Ses causes ne sont pas univoques, mais des études montrent qu’elle pourrait être liée à de l’anxiété généralisée, ainsi qu’à de l’anxiété liées aux tests (c’est-à-dire la peur de passer une évaluation).[1]  Selon les données de l’OCDE datant de 2012, 30% des élèves étaient affectés par l’anxiété mathématique, et ce nombre était en hausse dans de nombreux pays.[2] Inutile de le préciser, l’anxiété mathématique ne disparaît pas toujours à l’âge adulte…

Bien que nous ne sachions pas exactement d’où elle provient, nous pouvons cependant deviner que l’anxiété mathématique est nourrie par la pression sociale entourant les maths et, dans le cas des femmes, par les stéréotypes de genre. Il semble, en effet, que l’anxiété mathématique soit plus prédominante chez les femmes que les hommes.[3] Alors que des études ont montré que la différence entre les performances mathématiques des femmes et celles des hommes ne peut pas s’expliquer par des différences entre les genres[4], d’autres études ont découvert que les performances mathématiques des femmes sont perturbées par le stéréotype selon lequel les femmes n’ont pas la «bosse des maths»[5]. Cela contribue bien évidemment au fait que les femmes soient moins représentées dans les métiers des STEM. Ce manque de femmes dans les STEM mène en fin de compte à un paradigme scientifique moins riche, et privé d’une plus grande inclusivité et d’une attention aux besoins sociaux.

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Les personnes qui souffrent d’anxiété mathématique courent aussi le risque de manquer de certaines compétences basiques en numératie, étant donné que cette dernière requiert d’avoir quelques compétences en maths pour pouvoir vivre en tant qu’individu et citoyen. Si nous n’avons pas confiance en nos capacités mathématiques, nous ne pourrons pas effectuer des décisions efficaces dans beaucoup de situations de la vie courante. L’anxiété peut ainsi empêcher les adultes peu qualifiés d’essayer de poursuivre leur éducation, car ils n’ont peut-être pas les meilleurs souvenirs de leur parcours scolaire.

Mais alors, comment se débarrasse-t-on de l’anxiété mathématique ? Et comment pouvons-nous nous libérer du mythe de la «bosse des maths» ? Tout d’abord, il faut rendre les mathématiques significatives et intuitives à nouveau. Depuis longtemps, nous sommes devenus incapables de comprendre ce qu’elles servent à communiquer car nous les avons étudiées d’une manière déshumanisée. Nous ignorons alors qu’elles peuvent nous servir dans la vie quotidienne. C’est pourquoi les maths doivent être mises en lumière à l’aide de méthodologies non formelles. Essayer de nouvelles façons amusantes d’apprendre améliorera la confiance en soi des enfants qui ont des difficultés en maths, ainsi que des adultes peu qualifiés, ce qui prouvera que n’importe qui peut atteindre un bon niveau en maths. Toutefois, le but n’est pas de faire de tout le monde des experts en maths, mais simplement d’enseigner des compétences en numératie utiles pour la vie. Voilà la mission du projet Numeric[All].

[1] Hart, S. A., & Ganley, C. M. (2019). The Nature of Math Anxiety in Adults: Prevalence and Correlates. Journal of numerical cognition5(2), 122–139. https://doi.org/10.5964/jnc.v5i2.195

[2] OCDE (2013), « Mathematics Self-Beliefs and Participation in Mathematics-Related Activities », dans PISA 2012 Results: Ready to Learn (Volume III) : Students’ Engagement, Drive and Self-Beliefs, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264201170-8-en

[3] Hart, S. A., & Ganley, C. M. (2019). The Nature of Math Anxiety in Adults: Prevalence and Correlates. Journal of numerical cognition5(2), 122–139. https://doi.org/10.5964/jnc.v5i2.195

[4] Hyde, J. S., Lindberg, S. M., Linn, M. C., Ellis, A. B., & Williams, C. C. (2008). Gender similarities characterize math performance. Science321(5888), 494-495.

[5] Spencer, S.J.; Steele, C.M.; Quinn, D.M. Stereotype Threat and Women’s Math Performance. J. Exp. Soc. Psychol. 1999, 28, 4–28.